Continuons notre balade à la découverte des bastides du Rouergue avec ce deuxième épisode consacré à Réquista.
Lincou depuis l'ancien château
UNE ORIGINE LÉGENDAIRE
D’après une légende ou une tradition locale, il existait au XIIIe siècle une statue de la Vierge dans la chapelle du château de Cadars. Un jour, la statue disparut. Après des recherches, on la retrouva sous un noisetier et on la rapporta au château. Elle n’y fut pas si tôt installée qu’elle disparut une seconde fois. Elle fut de nouveau retrouvée sous le même arbre. Le phénomène se reproduisit de la même façon plusieurs fois. Alors, on apporta deux taureaux que l’on attacha ensemble. La statue fut posée sur leur tête et on laissa les animaux aller où ils voulaient. Naturellement, les bêtes se dirigèrent vers le noisetier et s’y arrêtèrent. On eut beau essayer de les déloger, les taureaux ne bougèrent pas. Alors, on se décida à construire une chapelle à l’emplacement du noisetier et on y installa la statue.
Cette chapelle, placée sous le patronage de Notre-Dame-de-Pitié, fit l’objet d’un pèlerinage très réputé. Elle serait à l’origine du bourg, peu à peu édifié autour du lieu de culte.
LA BASTIDE DE RÉQUISTA
À l’origine de Réquista, le comte de Rodez, Henri II, devenu seigneur des lieux. En 1292, la bastide est dotée d’une charte de franchises. Ce document règlemente la vie de la ville et de ses habitants. Privilèges, droits et devoirs y sont recensés. Elle nous donne également de précieuses informations sur le fonctionnement de la ville, comme le nombre de consuls (4) choisis chaque année pour l’administrer. Ils ne sont pas élus par les habitants mais choisis par les consuls sortants, lesquels deviennent alors conseillers des nouveaux pour une année. Ils sont les garants de la bonne marche de la cité et du respect des droits de chacun (communauté des habitants d’un côté, seigneur de la ville de l’autre). À leurs côtés, un bailli (ou bayle) représente le seigneur.
Les nouveaux habitants de la bastide se voient attribuer une parcelle en ville avec obligation de construire dans un délai d’un an leur maison. Ils reçoivent également une parcelle de jardin. En échange, ils jurent fidélité au comte et approuvent la charte.
S’installer dans la bastide présente de nombreux avantages : outre l’exemption de certains impôts, les habitants obtiennent le droit de chasse et de pêche dans les limites de la ville. Ce qui est, à cette époque, un grand privilège, ces droits étant réservés à la noblesse.
Ils peuvent profiter d’une activité économique importante, louer un étal près de chez eux et bénéficier d’un marché hebdomadaire, chaque samedi. Deux foires sont également organisées par an, à la Saint-Clément (23 novembre) et à la Saint-Cirice (16 juin). Les colons sont exemptés des impôts sur les marchandises, contrairement aux marchands ambulants, venant de l’extérieur.
Quelques édifices publics et collectifs sont mentionnés dans le document. Il existait au moins un four banal dans la ville, auquel les habitants avaient obligation de porter leur pain à cuire contre le paiement d’une redevance. De même, ils devaient amener leur blé au moulin du seigneur. La charte prévoit aussi la construction d’un hôpital, d’une église et d’un cimetière.
UNE VILLE MALMENÉE
Au XVIe siècle, les guerres de Religion frappent le sud du département. Plusieurs seigneurs – comme celui de Villefranche-de-Panat, se convertissent à la foi catholique. Ces conversions sont à l’origine de nombreuses échauffourées entre les deux camps pendant près d’un siècle (jusqu’en 1630). Réquista dut subir plusieurs fois le passage des catholiques ou des protestants. La ville fut même incendiée en 1586, lors du passage dans la région du duc de Joyeuse. De ces évènements vient sans doute le peu de vestiges médiévaux de la ville. Les plus anciennes maisons datent vraisemblablement des XVIIe et XVIIIe siècles, comme le montrent le décor de certaines portes.
S’il ne reste en apparence rien de l’ancienne bastide, malheureusement brûlée à plusieurs reprises, le parcellaire nous rappelle l’origine de la ville. Mais qui n’a pas été surpris par l’étroitesse des rues de Réquista ? En prenant de la hauteur ou en se penchant sur le cadastre du centre-ville, on retrouve bien le plan rectiligne, les rues se coupant à angles droits, que l’on rencontre si souvent dans les bastides!
L'ÉGLISE NOTRE-DAME-DE-PITIÉ
De l’ancien oratoire mentionné par la légende, il ne reste rien. L’église dut souffrir aussi des guerres de Religion. En tout cas, en 1862, lorsqu’il est décidé de la détruire, elle est en mauvais état. Devenue trop petite, les restaurations étant jugées trop coûteuses, l’édifice est démoli. La petite place sur laquelle elle se trouvait étant trop exigüe pour permettre de bâtir un bâtiment plus grand, la nouvelle église est construite à quelques pas de là, hors des limites de la ville médiévale. Mais la construction fut longue car il n’y eut pas toujours les moyens de la terminer.
PETIT DÉTOUR PAR LINCOU...
À 4,5 km de Réquista, le bourg de Lincou domine le Tarn. Aujourd’hui, un pont enjambe la rivière mais jusqu’au XIXe siècle, on la traverse à l’aide d’un bac. C’est à l’emplacement de ce point de traversée que s’établit le château de Lincou. Sans doute pour en contrôler le passage.
Du château médiéval ne reste que quelques vestiges sur une butte dominant l’église. Comme Réquista, Lincou se trouva sur le passage du duc de Joyeuse. Le seigneur des lieux s’étant converti au protestantisme, le château fut entièrement détruit. Aujourd’hui, trois croix de bois s’élèvent à son emplacement. Un nouveau château fut construit au XVIe siècle, plus bas, près du Tarn.
Pour découvrir Réquista et ses alentours, visitez le site de l'Office de tourisme
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